Missions : opération Ponant, piraterie maritime (11/04/2008)

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Contexte

Les actes de piraterie sont monnaie courante le long des côtes somaliennes, un pays plongé depuis plusieurs décennies dans une guerre civile qui a transformé la région en une zone de non-droit propice à la perpétuation d’activités criminelles. De son côté, la France est solidement implantée dans la région, disposant d’importants moyens militaires prépositionnés à Djibouti, à l’entrée de la mer Rouge.

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Cet évènement est survenu alors que la commission du « livre blanc » sur la défense, qui avait pour mission de rédiger un document engageant la politique de la France dans le domaine de la défense nationale pour les 15 années à venir, devait rendre ses conclusions à l’été 2008, l’incertitude planant sur les moyens octroyés la marine nationale dont les forces étaient jugées insuffisantes et vétustes dans les milieux de la défense .

Prise d’otage et réaction française

Le 4 avril 2008, le Ponant revient d’une croisière aux Seychelles. Il fait route vers la Méditerranée pour une nouvelle croisière, prévue du 21 au 22 avril entre l’Égypte et Malte.

Il est pris d’assaut à l’entrée du golfe d’Aden par une douzaine de pirates somaliens équipés de fusils AK-47 et de lance-roquettes RPG-7 à bord de deux embarcations rapides. Sur le voilier se trouvent 30 personnes officiellement membres d’équipage dont 22 de nationalité française. Ils tentent dans un premier temps de résister grâce à l’emploi de lances d’incendie mais se rendent après que les pirates ont fait usage de leurs armes.

Le commandant du Ponant a le temps de diffuser un message d’alerte de sûreté avant que le navire ne soit maîtrisé par les pirates. Le message est réceptionné par le Var, navire de la marine française qui patrouille dans la zone. Un navire des Forces canadiennes de la Combined Task Force-150 engagé dans la guerre contre le terrorisme, le HMCS Charlottetown, dépêche un hélicoptère qui confirme l’attaque. Le Premier ministre français François Fillon déclenche l’alerte « Pirate-Mer » et l’aviso Commandant Bouan faisant aussi partie de la TF150 et qui navigue à quelques centaines de milles du Ponant est dérouté sur zone et restera à proximité du bateau durant tout le déroulement des opérations. Aucune rançon n’est exigée à ce moment et le voilier fait route vers le sud dans l’océan Indien le long de la côte somalienne.

Le 6 avril 2008, une réunion de crise se tient à l’Élysée avec le Président de la République française Nicolas Sarkozy, le Premier Ministre François Fillon, le Ministre des Affaires Etrangères, le chef d’État-major et un représentant du ministre de la Défense Hervé Morin. Le Commandant Bouan ne disposant pas de capacité d’intervention, décision est prise d’envoyer des renforts. Un Transall parti de Djibouti parachute 18 commandos marins qui rejoignent le bord de l’aviso. Pendant la récupération des renforts, l’un des LCVP du Var coule suite à une fausse manœuvre.

L’amiral Marin Gillier des commandos marine ainsi que le colonel Denis Favier qui dirige le GIGN sont eux aussi largués en mer et commandent les opérations depuis le navire Var. La frégate Jean Bart transportant d’autres commandos et le porte-hélicoptères Jeanne d’Arc, bâtiment qui navigue alors entre Madagascar et Djibouti dans le cadre de la campagne d’application des officiers de marine et est équipé d’un hôpital de campagne convergent vers le Ponant qui s’est immobilisé le 7 avril 2008 à 850 kilomètres au sud de l’endroit où il a été détourné, le long des côtes du Puntland, une région somalienne de facto indépendante, à un mille marin du village côtier de Garaad. Ce même jour, une équipe du GIGN est envoyée à Djibouti afin d’envisager divers scénarios (négociations, intervention….

Des négociations sont entamées dès le 6 avril entre l’armateur et les preneurs d’otages ; l’armateur – la société CMA-CGM – installe une cellule de crise à Marseille et est conseillé par le GIGN. Les familles des 22 otages français sont reçues à l’Élysée. La situation semble toujours très tendue avec les pirates, l’équipe du GIGN est prête à intervenir. Dans le même temps l’armée française découvre l’identité des pirates : les « Somali Marines », l’un des groupes de pirates locaux les plus puissants.

Opération Thalathine

Le 11 avril 2008 a lieu la libération des otages. L’armateur aurait accepté le versement d’une rançon de l’ordre de 2 millions de dollars US. Ce sont des membres du GIGN qui procèdent à la remise de l’argent aux pirates au cours d’une opération nommée Thalathine (qui signifie ‘trente’ en Somali, comme le nombre d’otages. La transaction s’effectue en pleine mer entre deux hommes du GIGN, un membre du commando « Hubert » et trois pirates.

L’équipage est ensuite autorisé à quitter le Ponant à bord des embarcations de secours du navire. Après avoir fini de recompter l’argent, l’essentiel des pirates quittent le bateau et, enfin, Patrick Marchesseau, le capitaine du Ponant, est libéré et saute en mer où il est récupéré par les forces françaises. Les pirates ont profité de ce répit pour rejoindre la côte somalienne et se sont divisés en plusieurs groupes.

Une balle suffira.

Mais l’opération n’est pas finie. Il faut encore – si possible – arrêter les pirates.

Un Breguet Atlantic français équipé de moyens de reconnaissance sophistiqués envoyé sur zone repère l’un des 4×4 des pirates en fuite à environ dix kilomètres au nord de Garaad. Les avions ont repéré un groupe entrant dans une maison, entourée par une petite foule, dans le village proche. Qui sont ces gens ? Des miliciens, des familles, des passants ? Impossible d’intervenir sans faire de gros dégâts collatéraux. La décision est prise de renoncer à les poursuivre. Au bout de dix minutes, l’un des 4×4 des pirates s’éloigne. Sans que son chauffeur le sache, une Gazelle guidée par un Atlantic 2 vole à 100 mètres derrière lui. La porte est ouverte. Un commando tient en main un fusil MacMillan de 12,7 mm. Une balle suffira.

Le véhicule stoppe net, moteur détruit. Les hommes sortent du véhicule. L’un d’eux lève son kalachnikov et le repose assez vite, après qu’une balle tirée d’un hélicoptère a frappé le sol, entre ses deux pieds. Les six hommes courent, mais pas longtemps. Puis ils grimpent dans les hélicoptères. Et c’est à ce moment que le très gros pépin manque arriver. Un des avions Atlantic lance un Mayday, l’appel de détresse ! L’un de ses deux moteurs est tombé en panne… Impossible de continuer la mission. L’appareil d’observation bourré d’électronique se posera en catastrophe au Yémen.

Mais l’affaire est terminée et les pirates rejoignent les ex-otages sur les navires au large, tandis que les militaires français montés sur le « Ponant » se préparent déjà à appareiller. Quelques jours plus tard, les prisonniers seront envoyés à Paris pour y être jugés. Pour les militaires, cette opération est bien sûr l’occasion rêvée de faire valoir que sans une armée forte, déployée dans cette partie du monde, capable de monter en quelques heures une riposte inter­armées complexe, la France n’aurait pas pu réussir cette mission. Mais ça, c’est déjà une autre histoire…

Le rôle du GIGN

L’échange s’est fait en pleine mer. Trois sacs contenant 21 500 billets de 100 dollars viennent d’être remis par deux hommes du GIGN et un membre du commando « Hubert » à trois des pirates du « Ponant ».

Après un rapide comptage des liasses, les Somaliens, qui ont dissimulé des kalachnikovs sous une bâche, regagnent le rivage. Aussitôt, leurs complices décrochent du « Ponant » pour les rejoindre, tandis que le capitaine du bateau met à l’eau les annexes où s’étaient installés les otages. C’est le signal. Du « Jean-Bart », le navire militaire français le plus proche, des embarcations rapides, avec à leur bord des hommes du GIGN, filent vers le « Ponant », pour récupérer les otages et prendre possession du bateau.

Un scénario minutieusement préparé par le groupe d’élite de la gendarmerie. Dès le lendemain de la prise d’otages, le GIGN a envoyé ses hommes chez l’armateur du « Ponant », à Marseille, où s’active déjà leur négociateur régional. Coiffant ainsi au ­poteau le RAID, son homologue policier, qui avait dépêché sa propre équipe sur place.

Les négociateurs du GIGN vont alors « coacher », avec l’aide de la DGSE, les deux représentants de l’armateur en contact avec le capitaine du « Ponant » grâce à la radio de bord. Coup de chance pour les gendarmes, ils disposent déjà des photographies et des plans du bateau. Le GIGN, qui s’entraîne régulièrement avec le commando « Huber » dans le cadre du plan « Pirate-mer », s’est constitué une base de données sur les navires de commerce ou de plaisance susceptibles d’être pris en otage. Très vite, l’armateur confie aux négociateurs du GIGN qu’ils disposent de 3 millions d’euros débloqués par son assureur. Mais, comme le révèle Le Point, les pirates ne demanderont « que » 2 150 000 dollars. Les négociateurs n’ont jamais compris pourquoi cette somme précisément.

Dans la nuit du dimanche 6 avril, 10 gendarmes quittent leur base de Satory, dans les Yvelines, pour s’envoler vers Djibouti. Huit embarquent sur le navire de guerre français, le « Var ». Deux sont « tarponnés » à bord du « Jean-Bart », qui reste dans le sillage du « Ponant ».

En prévision d’un assaut, le GIGN renforce sur zone ses troupes de 15 hommes. Son patron, le colonel Favier, est lui-même « tarponné » sur le « Jean-Bart » avec deux autres gendarmes. C’est lui qui mettra la touche finale à la négociation. Le 8 avril, les pirates acceptent le principe d’une rançon en pleine mer. Sans que les otages soient débarqués en ­territoire somalien.

Source : Wikipédia, Spyworld-actu.com