
À Montberaud, un des gendarmes a été sauvé par son gilet pare-balles.

Ces opérations sous le feu des caméras ne sont pas forcément les plus lourdes. « Mi-juin, aux limites du Lot et du Cantal. Un homme tirait depuis chez lui. Les négociations restaient stériles. On a dû intervenir… »
Au moment où la colonne rentrait dans la maison, l’homme s’est fait sauter la tête avec un fusil de chasse. « Rien ne prépare à cela », admet le commandant. Difficile, même pour des gendarmes d’élite.
« D’ALERTE, UNE VIE PRESQUE MONACALE »
INTERVENTIONS > En six mois. L’activité de l’antenne GIGN de Toulouse augmente, notamment cette année.En 6 mois, ces gendarmes d’élite ont déjà réalisés 8 interventions, autant qu’en 2019, pas si loin des 79 opérations de 2020.
« Confrontés à un haut niveau de stress, nous ne pouvons pas paniquer. Pour cela, il faut se remettre en question constamment et répéter nos gestes ». Emmanuel T. commandant
Casque de 4 kg sur la tête, gilet pare-balles de 20 kg sur les épaules et pour certains le bouclier de 25 kg à bout de bras… Les hommes de l’antenne GIGN s’entraînent pour rester au top. Du tireur d’élite aux spécialistes chargés des effractions, en passant par les hommes spécialisés dans la récolte des renseignements, chacun possède sa mission. Cela ne les empêche pas de réviser leurs gammes ensemble chaque jour.
Au stand de tir en banlieue toulousaine, certains règlent la mire de leur HK UMP9. L’arme est légère, les tirs fluides. Avec leur visée laser, ils s’exercent à plus de 25 mètres de distance et touchent systématiquement le milieu de la cible. l’ambiance est détendue, fraternelle mais très professionnelle. « Ici vous avez intérêt à mettre un casque et des lunettes de protection pour éviter de devenir sourd ou borgne », s’amuse un des équipiers de l’AGIGN.
Sur les 32 membres de l’antenne toulousaine, 12 restent toujours en alerte permanente, prêts à intervenir dans les 30 minutes. « Quand nous sommes d’alerte, notre vie est presque monacale. Nous ne pouvons pas trop nous éloigner de la caserne », confie le commandant de l’unité, Emmanuel T.
Les vingt membres qui ne sont pas mobilisés en cas d’intervention urgente ne chôment pas pour autant. Leur programme quotidien est même impressionnant. En plus des séances de tirs, ces gendarmes s’adonnent au sport de combat, à 2 heures de musculation, au sport de combat, à la technicité, à l’aéro-cordage pour descendre des hélicoptères, sans oublier les mises en situation. « Tous ces exercices sont très importants. Les bons gestes et les bonnes pratiques deviennent des réflexes. Lorsqu’on est confronté à une situation anxiogène, à haut niveau de stress, nous ne pouvons pas paniquer. Pour cela, il faut se remettre en question constamment et répéter nos gestes afin que tout devienne mécanique », résume le commandant de l’antenne GIGN Plus les années passent, plus le nombre d’interventions se multiplie.
La dangerosité monte aussi d’un cran. Cette unité demande un tel engagement physique et psychologique qu’il est d’ailleurs difficile d’y rester toute sa carrière. « Notre moyenne d’âge se situe à 38 ans », précise l’officier. Des hommes expérimentés disponibles 24 heures sur 24.

Bientôt acteurs du GIGN 3.0
L’antenne GIGN de Toulouse a été officiellement créée le 1er avril 2016, prenant la suite du PI2G, peloton d’intervention 2e génération qui avait ouvert la voie en 2004 et réalisait des interventions du même type. Officialisées dans la foulée des attentats terroristes de 2015, quatorze antennes du GIGN véritable tête de pont des forces d’interventions, comme les policiers du Raid, existent a travers la métropole (sept unités) et outre-mer. Désormais, elles se trouvent directement placées sous l’autorité du GIGN, le groupe national implanté a Satory prés de Versailles en région parisienne.
Un groupe d’intervention fort désormais de 400 gendarmes, plus les 600 personnels des antennes qui vont former, 4 partir du 1er août, le GIGN 3.0. « Entre le groupe national et nous, les recrutements et les formations diffèrent, prévient un gendarme toulousain. Mais les échanges se sont intensifiés notamment pour la formation. Tous les deux ans,les membres des antennes montent suivre une semaine de formation. Bientôt cela devrait être tous les ans. D’anciens du groupe national ont rejoint les antennes, notamment a Toulouse. Et régulièrement, nous sommes engagés ensemble, comme en Dordogne fin mai. »

« Nous sommes beaucoup plus sollicités »
L’antenne toulousaine du GIGN, le Groupe d’Intervention de la Gendarmerie Nationale, connaît une année 2021 très rythmée. Son commandant Emmanuel T. se confie.
On a l’impression que l’antenne GIGN de Toulouse est de plus en plus sollicitée…
C’est le cas et les chiffres le prouvent. En 2018, nous sommes intervenus 48 fois, en 2019, 58 fois. Ce chiffre est monté à 79 en 2020, et pour le moment, au milieu de l’année 2021, nous avons déjà été sollicités 58 fois, et même 59 fois depuis jeudi !
Comment l’expliquez-vous ?
Même si notre cœur de métier reste la lutte contre le terrorisme, nous intervenons régulièrement sur des personnes dangereuses, retranchées chez elle, souvent armées. Je ne sais pas si c’est lié au confinement ou à d’autres facteurs, mais ce genre d’opérations sur ce qu’on appelle des forcenés devient plus fréquent. Ces six derniers mois, nous avons aussi été appelés en renfort dans les Cévennes et en Dordogne par la traque de fugitifs dangereux.
Sur quels critères repose votre engagement ?
J’en dénombre trois qui sont non cumulatifs. On va d’abord évaluer la dangerosité de l’individu, en récoltant un maximum de renseignements sur lui, son passé, les armes qu’ils pourraient détenir ses motivations etc… Ensuite, on se penche sur la technicité de l’intervention. Par exemple si l’on a du mal à le localiser ou s’il se trouve dans un lieu à risque. Enfin, on va aussi évaluer la sensibilité de l’intervention ou du profil de la personne. Si l’un de ces critères est rempli, nous y allons.
Ces dernières semaines, vos hommes ont été pris pour cible plusieurs fois. Craignez-vous la mort lorsque vous partez en intervention ?
La première chose à savoir, c’est que nous faisons face à une population de plus en plus fréquemment armée et à bout de nerfs. Lorsque nous sommes alertés, nous avons 30 minutes pour nous équiper, partir et arriver sur place le plus vite possible. Nos équipes n’ont pas le temps de se poser beaucoup de questions. Elles sont concentrées sur leurs objectifs. Le but reste de préserver les vies humaines. En revanche, pour nos familles, c’est plus difficile. Elles sont souvent informées par les médias de la situation périlleuse et ont toujours la crainte que l’un d’entre nous ne rentre pas.
Propos recueillis par Rémi Bruhaglar